Elections européennes : un enjeu d’avenir

Lettre de Serge Lagauche, pour le groupe socialiste du Sénat

Dans cette campagne européenne, la droite ressort les grosses ficelles électorales. Après la stratégie d’évitement, la bonne vieille radicalisation sur des thèmes prétendus clivants ! Pendant plusieurs semaines, les Français ont ainsi pu légitimement se demander si, pour l’UMP, il y avait une élection européenne. Pas d’idées et pas d’équipes ! La gauche faisait campagne seule, dans une indifférence médiatique d’ailleurs problématique, et les sondages remplaçaient les débats de fond. Désormais, à moins de deux semaines du scrutin, on nous ressert les bons vieux marronniers de la sécurité et de l’immigration, censés regrouper les électeurs conservateurs derrière l’UMP, y compris ceux portés vers l’extrême droite, comme cela a été le cas lors de l’élection présidentielle de 2007. Comme l’énonce Brice Hortefeux,  » les fondamentaux sont les domaines régaliens : justice, sécurité, immigration. C’est là-dessus que les électeurs se déterminent. Le reste, l’économie, c’est mondialisé « .

Eh bien non ! L’enjeu est d’abord économique et social. Et la résignation ne doit pas servir de programme car de cette élection pourrait découler beaucoup de notre avenir. La zone européenne est en récession, plus forte encore que dans les autres grandes zones économiques. Mais l’Europe est la solution, la seule solution. La restauration de la confiance et le retour de la croissance ne pourront se faire qu’à travers un nouveau projet européen, construit autour d’un programme de relance conséquent, fédérateur et innovant.

Conséquent car le monde est aujourd’hui confronté à une puissante crise de demande. La dépense est bridée à la fois par le rationnement du crédit de la part de banques mal en point et par une remontée de l’épargne des ménages, causée par la fonte de leur patrimoine financier pour une minorité, par l’inquiétude sur l’avenir pour la majorité. Conséquence : les chefs d’entreprise réajustent par anticipation leurs productions et les effectifs à la baisse, ce qui accroit la récession. Ce cercle vicieux ne peut être cassé que par une intervention forte de l’Etat. Or, le plan de la Commission européenne n’est que de 1,5 % du PIB, dont 1,2 % à la charge des Etats. En comparaison, le plan américain est de plus de 4 % du PIB. Pour la France, c’est 26 milliards, en fait 15 milliards si l’on enlève les mesures de trésorerie. Il nous faudrait en France un plan de 100 milliards d’euros pour sortir de la crise et en Europe une volonté beaucoup plus forte, y compris en utilisant le budget européen.

Ce projet doit aussi être fédérateur. Car pour inverser les anticipations pessimistes, il faut un dessein susceptible de restaurer la confiance en l’avenir et de fédérer les énergies. C’est d’abord l’occasion ou jamais de coordonner les politiques budgétaires au sein de l’Union européenne. Pour être efficace, la relance doit être menée dans tous les pays à la fois ; le jeu du « passager clandestin » mène à une récession longue. Une stratégie d’investissements coordonnée et ambitieuse est ainsi réclamée par les socialistes. Ensuite, cette relance doit s’accompagner d’une réelle mobilisation en faveur de l’Europe sociale et de la défense des services publics afin de montrer aux citoyens européens que l’Europe les protège et est d’abord un modèle de société fondé sur un haut niveau de protection sociale. C’est pour cela que le PSE défend l’idée d’un pacte européen pour l’emploi et d’un pacte européen pour le progrès social.

Enfin le projet doit être innovant. La crise économique survient sur fond de crise écologique. Le plan de relance doit être l’occasion d’orienter l’économie vers un modèle de croissance plus écologique, qui sera de plus source de très nombreux emplois nouveaux. Il faut investir massivement dans les transports collectifs, dans les énergies renouvelables, dans la rénovation thermique des bâtiments, etc. En France, l’occasion a été manquée. Les projets de lois dits « Grenelle » en discussion cet été le montrent amplement.

L’enjeu de cette élection européenne est important. Une majorité de gauche au Parlement européen permettrait de lutter efficacement contre la crise et de mettre en place les conditions d’une juste répartition des richesses pour les populations. Une majorité de gauche permettrait de redonner en définitive un sens au projet européen.

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