Bilan de la politique extérieure de N. Sarkozy

Un extrait de la convention sur la nouvelle donne internationale et européenne, soumise au vote des militants le 30 septembre et donnant lieu, le 28, à une AG fédérale.

Dans ce contexte, la politique étrangère de M. Sarkozy n’a pas su apporter de réponses vraiment appropriées. Elle a vanté son propre dynamisme mais elle a privilégié en réalité une stratégie faite surtout de coups médiatiques et de postures changeantes (un jour atlantiste, un autre altermondialiste ; tantôt pourfendant les autorités chinoises et tantôt les courtisant ; régulateur à l’étranger, ultralibéral en France). Elle a parfois compromis par ses positions l’image internationale de la France.
Son soutien aux principes du tout-marché et du désengagement de l’État a fait souvent le jeu d’une mondialisation libérale, d’un système où le partage de la valeur ajoutée a continué de se déformer en faveur du capital, cependant que la condition salariale se dégradait. Le tournant de l’automne 2008, alors que la crise financière mettait à nu ces dérives, n’est venu opposer qu’une réponse tardive et partielle. Parallèlement, la politique française d’aide publique au développement, dont le montant rapporté au PIB décline malgré les engagements présidentiels, s’est détournée progressivement de la lutte contre la pauvreté pour épouser des objectifs principalement économiques ou migratoires.
En dépit d’initiatives médiatiques fréquentes, le chef de l’État n’a pas su faire de la France l’élément durablement moteur d’une Union européenne relancée, capable de peser d’une façon décisive dans la régulation de la mondialisation. Au coeur de la crise, la présidence française de l’Union a déployé de l’énergie, mais elle aura été plus spectaculaire dans ses annonces qu’exemplaire dans ses résultats. Elle n’aura su ni redynamiser en profondeur le projet européen, ni affirmer un véritable leadership collectif, renvoyant plutôt l’image d’une Europe divisée par ses égoïsmes nationaux. Le rendez vous euro-méditerranéen a été manqué, et l’Union pour la Méditerranée est à ce stade dans l’impasse. Sur de grandes questions comme le climat, la gouvernance économique ou les leviers de la croissance, l’Union européenne a montré sa fragilité et son manque d’unité. La dégradation de la relation pourtant essentielle entre Paris et Berlin est apparue à la fois comme une cause et un symptôme d’une crise européenne. La panne de ce moteur – avec des responsabilités partagées – est l’un des principaux échecs de la politique étrangère française depuis trois ans.
En matière de sécurité collective, la ligne atlantiste suivie par l’Elysée a affaibli la portée d’une voix française sur les grands conflits d’un monde devenu multipolaire. En enkystant notre pays dans la guerre en Afghanistan sans garanties suffisantes sur nos objectifs politiques dans ce pays, le chef de l’État a épousé de fait la ligne des néoconservateurs de Washington. Il l’a fait, paradoxalement, alors même que les Etats-Unis portaient à la Maison Blanche, avec le Président Obama, une équipe démocrate attachée à revisiter la politique étrangère américaine. Symbole de ce choix, le retour de la France dans la structure militaire intégrée de l’OTAN ne s’est pas traduit, contrairement à ce qui avait été promis, par un véritable surcroît d’influence dans l’appareil militaire de l’Alliance ni par une avancée sur le terrain de la défense européenne, alors que nous devrons en revanche assumer les charges financières nouvelles liées à notre réintégration dans la machinerie administrativo-militaire de l’OTAN et en subir les contraintes. Elle ne s’est accompagnée d’aucune réflexion aboutie sur le rôle et le devenir de l’Alliance, alors que l’affrontement Est- Ouest qui en était la raison d’être initiale appartient désormais à l’histoire.
Parallèlement, nos outils d’intervention et d’influence à l’étranger se sont dégradés. Illustration la plus marquante : l’affaiblissement de notre outil diplomatique et consulaire, constaté et regretté par des dirigeants politiques de tous bords. Au moment où les effectifs du Département d’État américain continuent de croître, où ceux du Foreign Office britannique ont dépassé les effectifs de notre réseau diplomatique, où le Brésil a ouvert une trentaine de nouvelles ambassades, le ministère français des Affaires étrangères a perdu, depuis 2003, plus d’un cinquième de ses moyens d’intervention et de fonctionnement, proportion qui risque de s’aggraver d’ici à 2012. La mise en oeuvre précipitée, à partir de juillet 2008, d’un plan mal conçu de redéploiement et de réduction de nos moyens de défense est venue fragiliser nos forces opérationnelles, cependant que notre engagement croissant sur des théâtres extérieurs accentuait la tension sur notre dispositif. Affaiblissement des moyens des ambassades, fragilisation de nos ressources militaires, marginalisation de notre diplomatie professionnelle au bénéfice de réseaux politiques parallèles, fermeture de nombreux centres culturels, baisse des crédits à la francophonie, recul sans précédent des budgets d’aide publique au développement consacrés aux dons dans les pays les plus pauvres : sur tous ces plans, force est de constater que la France a malheureusement régressé.
Ces résultats, M. Sarkozy tente de les masquer ou de les gonfler : sur de nombreux sujets – Afghanistan, relations avec la Chine… – il change de posture au gré des moments et des interlocuteurs. Il est allé parfois jusqu’à compromettre notre image internationale, par exemple par ses positions récentes inacceptables reliant l’insécurité et la présence d’étrangers en France. Annoncer en fanfare, fixer des objectifs irréalistes et souvent contradictoires, négliger les divergences de vue et d’intérêts, surévaluer les capacités d’un « homme providentiel présidentiel », résultat : peu cohérente et difficile à comprendre par nos partenaires, cette politique étrangère s’est révélée au total peu efficace et elle est jugée peu fiable.

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